Lire la Seconde Guerre mondiale, un devoir de mémoire

Petites chroniques littéraires : Today We Live d’Emmanuelle Pirotte, Le dernier des nôtres d’Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Par amour de Valérie Tong Cuong. Autant de roman qui racontent la Seconde Guerre mondiale. Et autant de lecture qui nous empêchent d’oublier la cruauté de cette page de l’histoire.

Lorsque je lis un roman, j’aime être portée par l’histoire. Longtemps j’ai été rebutée par les fictions réalistes, et plus que tout par celles qui étaient historiques. Je ne voulais pas me retrouver dans la position d’une élève lors de mon temps libre. Or le roman historique avait des airs de maîtresse fana des détails factuels et chronologiques.

Puis j’ai grandi, et j’ai lu Today We Live d’Emmanuelle Pirotte. Dans un de mes billets de blogs je vous disais combien ce livre avait été un coup de cœur et avait eu l’effet d’un coup de pied. J’ai découvert la puissance d’un récit qui s’appuie sur des archives et des études, et de l’effet qu’il a sur son lecteur.

Oublier ou non ?

J’ai décidé aujourd’hui de vous parler de trois romans que j’ai lus dans le cadre du prix des lecteurs de Livre de Poche : Today We Live d’Emmanuelle Pirotte (encore et toujours), Le dernier des nôtres d’Adélaïde Clermont-Tonnerre, et Par Amour de Valérie Tong Cuong. Ces trois romans racontent tous la Seconde Guerre mondiale.

Ce sujet grave de notre passé collectif nous est enseigné à l’école. L’apprentissage de dates de clés ne nous permet pas de saisir l’anxiété de vivre dans une ville occupée et bombardée, l’angoisse d’être emporté par la Gestapo, ou l’horreur de vivre prisonnier des camps de concentration. La fiction en revanche, permet l’identification. On ressent plus fortement les peurs, les espoirs, les haines de ceux qui ont vécu à cette période.

Ma professeure d’histoire-géographie de quatrième puis celle de prépa littéraire, m’ont appris, résignées, que l’Homme n’apprenait pas de ses erreurs, et reproduisait inlassablement des horreurs. J’ose espérer que non. J’ose espérer que revivre le passé par la fiction, nous permet par la distance de l’écrit de nous protéger du poids de la culpabilité, mais de nous doter quand même d’empathie et de raison par l’identification.

Petites Chroniques littéraires

Voici donc trois petites chroniques littéraires de romans sur la Seconde Guerre mondiale qui m’ont rappelé mon devoir de mémoire :

Today We Live, Emmanuelle Pirotte

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Résumé officiel

Une rencontre improbable…

Décembre 1944. C’est la contre-offensive allemande dans les Ardennes belges. Pris de panique, un curé confie Renée, une petite fille juive de 7 ans, à deux soldats américains. Ce sont en fait des SS infiltrés, chargés de désorganiser les troupes alliées. Les deux nazis décident d’exécuter la fillette. Au moment de tirer, Mathias, troublé par le regard de l’enfant, tue l’autre soldat.

Commence dès lors une cavale, où ils verront le pire, et parfois le meilleur, d’une humanité soumise à l’instinct de survie.

Aucun personnage de ce roman palpitant n’est blanc ou noir. La guerre s’écrit en gris taché de sang. Une écriture efficace et limpide.

Mon avis

Petit roman où tout se tient, où tout est nécessaire. La relation entre Renée et Mathias est intense, presque mystique. Elle nous touche d’autant plus que la focalisation passe d’un personnage à un autre avec une fluidité quasi cinématographique : on s’identifie, puis on les regarde avec envie. Ce mode narratif me rappelle celui de Virginia Woolf. L’attention portée au sens rend la lecture d’autant plus saisissante… On n’en ressort pas indemne. Vous l’avez compris, ce roman, c’est mon petit chouchou. C’est une fiction envoûtante, et pleine de vitalité !

Le dernier des nôtres, Adélaïde de Clermont-Tonnerre

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Résumé officiel

«La première chose que je vis d’elle fut sa cheville, délicate, nerveuse, qu’enserrait la bride d’une sandale bleue…»

Manhattan, 1969 : un homme rencontre une femme.
Dresde, 1945 : sous un déluge de bombes, une mère agonise en accouchant d’un petit garçon.

Avec puissance et émotion, Adélaïde de Clermont-Tonnerre nous fait traverser ces continents et ces époques que tout oppose : des montagnes autrichiennes au désert de Los Alamos, des plaines glacées de Pologne aux fêtes new-yorkaises, de la tragédie d’un monde finissant à l’énergie d’un monde naissant… Deux frères ennemis, deux femmes liées par une amitié indéfectible, deux jeunes gens emportés par un amour impossible sont les héros de ce roman tendu comme une tragédie, haletant comme une saga.

Vous ne dormirez plus avant de découvrir qui est vraiment «le dernier des nôtres».

Mon avis

La narration de ce roman oscille entre l’histoire en 1969 et des analepses dans le passé du héros. Lorsqu’on quitte une époque avec regret, ce sentiment s’évapore à la minute où on retrouve un autre moment de l’histoire. On se laisse porter volontiers par ce roulis d’aventures qui finissent par toutes s’emboîter parfaitement. Une lecture fluide et sans heurt. Un régal ! Quant au récit de la guerre, il se fait partiel, par petites touches : le sort des ingénieurs allemands, la terreur des bombardements, la terrible réalité des camps, la violente envie de justice des générations suivantes… Sans en être le sujet principal, la guerre est bien présente, comme un souvenir qui s’impose aux personnages comme au lecteur.

Par Amour, Valérie Tong Cuong

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Résumé officiel

« Tout comme mes grands-parents, ma mère parlait peu de la guerre. Ou bien seulement avec d’autres Havrais. Je devinais pourtant qu’ils avaient vécu l’enfer. Un jour, j’ai saisi les raisons de ce silence. La ville n’avait pas seulement été occupée par les Allemands. Nos propres alliés, les Anglais, l’avaient bombardée sans relâche, puis détruite, assassinant nombre de ses habitants. Ce n’était pas une chose à dire.
Alors, j’ai voulu comprendre. Il a fallu retrouver des témoins du drame. Exhumer des archives. Ce que j’ai découvert m’a éclairée sur ce qu’est le courage, l’abnégation, et sur l’amour, qui était demeuré leur seul carburant. » – Valérie Tong Cuong

Voici donc l’histoire de deux familles havraises emportées dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale. D’un côté, Joffre et Émélie, concierges d’école durs au mal, patriotes, et leurs enfants ; de l’autre, le clan de Muguette, dont l’insouciance sera ternie par la misère et la maladie.

Du Havre à l’Algérie où certains enfants seront évacués, des chemins de l’exode au sanatorium d’Oissel, ce roman choral met en scène des personnages dont les vies secrètes s’entremêlent à la grande Histoire, et nous rappelle qu’on ne sait jamais quelles forces guident les hommes dans l’adversité.

Commentaire

Ce roman nous plonge dans l’univers réaliste et documenté d’une vie sous l’occupation. Encore une fois, cette fiction fait tout pour éviter le manichéisme : les personnages sont humains, ils ont leur part d’égoïsme, de solidarité, de courage, de lâcheté… Ils subissent cette guerre et ses conséquences. Incarnée tour à tour par des personnages différents, la narration nous offre différentes perceptions de ce moment de l’Histoire. À tous ceux qui veulent se plonger dans le quotidien de la France occupée, cette lecture est faite pour eux !

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